
Murchan le voleur, Hardiz demi-griffon, le Chevalier Chasseur, Yon le Grand… La Gascogne médiévale foisonne de héros légendaires aujourd’hui tombés dans l’oubli. Preux et batailleurs, alliés du roi Arthur ou ennemis de Charlemagne, leurs aventures sont pourtant extraordinaires et méritent d’être chantées à toutes les tables du monde.
Ce recueil présente une quarantaine de personnages issus de cette geste gasconne qu’ont alimentée plusieurs générations de poètes. Une place généreuse sera d’ailleurs accordée à ces derniers : car les troubadours gascons, à l’esprit tonitruant, devinrent rapidement des personnalités elles aussi tout à fait fabuleuses.
Alors oyez, oyez ! Entrez dans la Gascogne épique et poétique !
La Geste des Gascons
Bien qu’aucun manuscrit ne semble avoir été composé en leur pays ni en leur langue, les Gascons apparaissent à de nombreuses reprises dans les chansons de geste ; ils en sont même parfois les héros principaux. Dans cet univers littéraire foisonnant, le rôle, le caractère et les fonctions des personnages ne sont jamais figés et varient parfois jusqu’à la contradiction. La géographie est également confuse, et que dire du temps, quand certains héros se retrouvent d’une œuvre à l’autre contemporains de Charles Martel, de Pépin le Bref ou de Charlemagne. C’est pourquoi nous souhaiterions proposer ici, afin d’y voir plus clair, un répertoire – un début de répertoire, pas encore exhaustif – des personnalités légendaires de Gascogne ayant nourri l’imaginaire médiéval ; un répertoire qui servira à mettre en lumière une « contre-Matière » digne de nourrir à son tour, peut-être, l’inspiration de futurs créateurs sensibles au médiévalisme.
Les troubadours gascons
On compte une trentaine de troubadours gascons. Présents dès les débuts du mouvement, les pionnier (Cercamon, Marcabru) marquèrent considérablement les mentalités et leurs œuvres inspirèrent sensiblement la postérité, notamment leurs compatriotes. Comme celles des autres troubadours, leurs poésies ont été transmises par des manuscrits du XIIIe et XIVe siècle rédigés dans une langue romane relativement unifiée, dont la référence semble avoir été le limousin qu’utilisait Guilhem IX, langue de naissance du trobar. Mais leurs compositions, marquées de nombreux gasconismes, permettent toutefois d’identifier leur origine – pour ceux qui ne possèdent pas de biographie qui mentionne clairement cette dernière. En effet, dans certains chansonniers, des vidas (biographies) composent l’en-tête des listes des chansons des troubadours. Leur fiabilité historique est cependant très relative car elles ont principalement été inventées d’après les œuvres des concernés : tributaires de l’interprétation des vers des poètes, elles se rapprochent donc plus du récit imaginaire que de la réalité.